Dans la nuit de dimanche à lundi au Staples Senter de Los Angeles, Phoenix a été le premier groupe français à recevoir un Grammy Awards dans la catégorie "best alternative music album".
Phoenix reçoit donc ce prix après des groupes comme The White Stripes, Coldplay ou Radiohead l'an passé avec In Rainbows. C'est dire si ce prix consacre plus qu'il ne révèle.
Or, Phoenix chante en anglais depuis plus de dix ans et maintenant quatre albums. Dans la décennie, on a vu apparaître des groupes plus ou moins folk comme Syd Matters et Cyan & Ben ayant choisi la même option. Puis ce fut la vague rock parisienne avec Hush Puppies, Stuck in th Sound, Nelson. Les plus commerciaux, venant des lycées les plus chics de Paris auront fini par percé à Taratata ou au Grand Journal : BB Brunes, Plasticines... Difficile de dire tout le mal qu'on pense de leurs qualités musicales. Et comme avec Syd Matters, ce sont les moins ouvertement rock qui décrochent la timbale : The Dø ou Moriarty. Depuis Feist a aussi décroché la récompense des meilleures ventes de disques pour une artiste étrangère signée en France pour Let it Die sorti en 2004 chez Polydor. La démarche de Camille est sans doute la plus intéressante de toutes qui, partie d'un disque de chanson en français aux accents folk et bossa, parvient deux disques plus tard à Music Hole (2008) : un album chanté en anglais à 80 %, où le français n'a plus qu'une fonction subliminale ou percussive. Ce qui permet à son auteure de me dire pour VoxPop en avril 2008 qu'elle "ne devient pas anglaise en chantant en anglais", mais qu'elle est "le symptôme d'un monde qui se mélange".
Pour en arriver là, il a fallu que la chanson en français repousse ses limites jusqu'à se perdre volontairement dans les relations entre littérature et musique. Alain Bashung sort L'Imprudence en 2002 qui bouscule toutes les certitudes pour un Dominique A qui en sortant Tout Sera Comme Avant en 2004 essaie de comprendre la méthode employée par le premier. En commandant des nouvelles à partir de titres de ses chansons à des auteurs qu'il affectionne, M. A brouille les frontières entre l'art dit mineur et celui dit majeur. Il montre qu'un disque ne s'arrête pas à ses limites physiques. Et qu'il commence peut-être même avant qu'on ne l'écoute. Noir Désir qui sort le long morceau "L'Europe" en 2001 sur l'album Des visages des figures va au bout de sa logique et de son voyage vers l'irréel, avec le long poème Nous n'avons fait que fuir improvisé sur un morceau d'une heure, joué une seule fois à Montpellier en 2002 et immortalisé sur livre disque publié en 2004 chez Verticales, comme celui de Dominique A.
Certaines productions de Bashung, Noir Désir, Dominique A, et même de Camille descendent de Melody Nelson, le premier des trois concept albums de Gainsbourg. De là à dire qu'elles sont elles aussi des concept albums...
Le monde de la musique américain reconnait aujourd'hui qu'un groupe français a su faire un meilleur disque que les anglo saxons. Et les retombées pourraient être surtout visibles en France, où les directeurs artistes, s'ils existent encore, vont devoir s'aligner sur la demande et faire avec. Une révolution musicale à commencé en France depuis quelques années. Camille est un pont entre la tradition Gainsbourgeoise et la tradition anglo saxonne. Noir Désir s'est éteint. Bashung est mort. Et même Dominique A, sortant La Musique l'an passé, a revisité dans le parti pris des arrangements, ses disques de new wave préférés, optant pour des paroles à la fois anodines et énigmatiques, qui comme en anglais, n'ont pas besoin de chercher la rime pour être belles. Comme s'il cherchait à regagner en fraicheur en se déchargeant de ce qui fait son image de chansonnier intellectuel à la française. Si le marché américain pour qui Phoenix représente 300 000 albums vendus de leur dernier Wolfgang Amadeus Phoenix reconnait que les français décomplexés sont aussi bien placés que les autres pour faire des têtes d'affiche de festival, pourquoi les maisons de disques françaises continuerait à nourrir ses complexes à coup de Mickey 3D ?
A l'heure qu'il est, c'est comme s'il ne s'était rien passé : Phoenix n'est même pas nominés aux victoires de la musique. Faut-il donc se réjouir que le succès du groupe soi un phénomène qui arrive à l'étranger ? Pourquoi pas ? Après tout, Gainsbourg n'était à aux USA à New York, underground, à la différence qu'il chantait en français, et n'avait pas pour objectif de faire comme les américains...
mardi 2 février 2010
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